Renouncing the causes of suffering - 16 pieces of advicesEnglish Translation here :
https://books.google.fr/books?id=-GP2roSmNeAC&pg=PT58&lpg=PT58&dq=pema+lingpa+since+your+mother+gave+you+birth&source=bl&ots=lyA-rKk3UX&sig=JRSJriIBDC5iVkP5fJDioE-TC0w&hl=fr&sa=X&ei=F5hBVYeeB4KwUdr6g4AI&redir_esc=y#v=onepage&q=pema%20lingpa%20since%20your%20mother%20gave%20you%20birth&f=falsePéma Lingpa s’était retiré dans un ermitage de montagne, au lieu-dit Les
Hauts de la Vallée d’Or, où il vécut longtemps seul dans une hutte de
bambou. À contempler d’en haut les gens de la vallée qui s’affairaient
du matin au soir, une profonde tristesse s’empara de lui. « Eh bien, on
dirait que je suis aussi distrait par
les affaires de ce monde que ces villageois en bas ! » se dit-il. Et il
composa les conseils suivants destinés à s’encourager lui-même :
Namo guru swasti siddham !Hommage au maître. Que l’accomplissement spirituel triomphe !
Ô maître Né-du-lotus, je vous prie :
Puissent les enseignements du Bouddha
Par votre bénédiction se répandre !
Péma Lingpa, toi le clochard de cette sinistre époque,
Depuis que ta mère t’a mis au monde
Tu as oublié de penser à la mort,
Et les distractions t’on fait perdre la tête.
Tous les êtres des six modes d’existence
Errent dans le samsara, pris par le désir et l’attachement,
Désirant ceci et rejetant cela.
Vois toute chose comme une bulle sur l’eau
Ou comme un mirage en plein ciel !
Pense au fait que rien ne dure, Péma Lingpa !
Il est certain que les êtres qui sont nés
Sur les quatre continents finiront par mourir.
Dans toutes les générations passées,
On ne compte aucun homme qui ne soit mort.
Tel sera le sort des hommes du présent,
Et tel sera celui de ceux qui nous succéderont.
Troublé par l’incertitude de l’heure fatale,
Pense à la mort, Péma Lingpa !
Tu es né dans la fange du samsara, ta patrie,
Et jusqu’à l’âge de neuf ans tes parents ont pris soin de toi.
Tu as ensuite erré dans la société des hommes
Et, sans qu’on te l’ait appris, tu as été un assez bon orfèvre.
Mais tu n’es en fait qu’un vaurien servile,
Un vulgaire colporteur du sacré.
Bien que dépositaire de la parole d’Oddiyana*,
Tu es distrait par les leurres de l’attachement et de l’aversion.
Élimine tout égarement, Péma Lingpa !
*Oddiyana,
Orgyen en tibétain, désigne ici Padmasambhava, dont il est dit qu’il
naquit dans un lotus au milieu du lac Danakosha, en Oddiyana, ancien
pays du nord-ouest de l’Inde, correspondant probablement à la vallée de
la Swât au Pakistan, d’où sont originaires de nombreux autres grands
maîtres bouddhistes, notamment Garab Dorjé, le premier maître humain de
la tradition Dzogchen.
À l’aube de l’année du Singe, la trente-septième de ta vie,
Tu découvris de profonds trésors comme Oddiyana l’avait prophétisé.
Devenu dépositaire de nombreuses et profondes instructions,
Tu les as laissés dans la paresse et l’indifférence
Sans les mettre en pratique intégralement.
Comme l’eau qui sourd en dessous d’une grotte,
Les émotions négatives rôdaient sans que tu en fusses conscient.
Transforme donc ton esprit, Péma Lingpa !
N’ayant pas renoncé à la soif de nourritures et de richesse,
Tu t’es glissé dans le carcan de l’avarice et de l’attachement au moi.
Englué dans l’ego, dévoré de désirs, tu te bernes toi-même.
Te répandant en louanges pour tes amis et proches
Qui te leurrent avec leurs biens et leurs victuailles,
Tu n’es qu’un idiot, incapable d’accumuler mérites et sagesse.
Tranche l’attachement à l’ego, Péma Lingpa !
Tu bichonnes et pares d’ornements ton corps,
Cette illusion empruntée aux quatre éléments,
Et les objets des six champs de perception
Que perçoivent tes sens se jouent de ton esprit.
Ton corps illusoire que tourmentent, imprévisibles,
La naissance, la maladie, la vieillesse, et la mort, tu l’espère éternel,
Mais il disparaîtra : cesse de le chérir, Péma Lingpa !
Tu es mesquin avec les gens ordinaires,
Bien qu’à eux de nombreux liens karmiques t’unissent.
Envers les pratiquants de la voie, tu manques de vision pure,
Et, avec les maîtres qui t’enseignent, tu ne respectes pas les liens sacrés.
Tu n’as aucun respect envers les êtres sages
Ni aucune gratitude envers ceux qui te font du bien.
Quand au cercle vicieux du samsara, il ne t’attriste point.
Finis-en donc avec tout cela, Péma Lingpa !
Ils sont fermement établis dans le Grand Véhicule,
Ils ont dompté leur esprit par l’étude, la réflexion et la méditation,
Ils ont acquis une parfaite assurance dans les phases de création et complétude
Et sont experts dans les trois voies graduelles,
Mais toi, de ces sages tu ne vois que les défauts,
Et tu méprises autrui :
Tu es comme l’insensé qui marche
Vers un précipice les yeux grands ouverts.
Cultive la vision pure, Péma Lingpa !
Ton pays natal est la geôle de Mara, le fauteur d’obstacles.
Tes amis et tes proches sont ses rabatteurs,
Nourritures et richesses sont ses truands,
La samsara, le piquet auquel il t’amarre,
Sa corde, ta paresse,
Et sa source, ton attachement au moi.
Toi qui ignores ta propre nature et ne cesse de temporiser,
Abandonne donc les huit préoccupations mondaines, Péma Lingpa !
Tu n’as d’égard que pour les désirs immédiats,
Et tandis que ta vie s’épuise, jour après jour, nuit après nuit,
Et que ton corps vieillit au fil des mois et des années,
Ton esprit s’enfonce dans la boue de l’ignorance
Et tu remets à plus tard ta pratique !
N’ayant jamais compris où se trouvait ton propre bien,
Rigide et sans Dharma, tu te dupes toi-même.
Réfléchis-y, Péma Lingpa !
Tu te donnes l’apparence d’un renonçant,
Mais sans la moindre compréhension du non-né,
Tu ne seras bouddha en feignant simplement de l’être !
Consacre-toi au sens avec diligence
Car le comprendre simplement ne suffit pas à le réaliser.
Faute d’élucider l’esprit dans toute sa profondeur,
Tu ne mettras pas fin au voile des concepts.
Va jusqu’au fond des choses, Péma Lingpa !
Délaisse les vaines activités du monde
Et, loin de tout, libre d’affairements,
En un lieu calme perdu dans les montagnes,
À l’abri d’une grotte spacieuse et ouverte,
Seul, abandonne ton corps et ton esprit.
Adopte la posture en sept points de Vairocana
Et, avec l’intention d’aider tous les êtres,
Unis ton esprit à celui de ton maître. Visualise-le
Continuellement au-dessus de ta tête, Péma Lingpa !
L’incomposé est l’esprit originel ;
L’absence de nature propre, l’esprit fondamental ;
L’omniprésence, l’esprit manifesté ;
Ce qui saisit les six objets, l’esprit des six champs de perception ;
Ce qui est mû par le karma, l’esprit des six classes d’êtres ;
Ce qui s’attache au moi, l’esprit égaré,
Et ce qui est libre d’impuretés, l’esprit en soi ;
Sois-en parfaitement convaincu, Péma Lingpa !
Quand tu cultives le calme intérieur,
Quelles que soient les pensées qui te viennent,
Reconnais-les avec une grande acuité,
Scrute-les et libère-les dans leur nudité,
Et pose-toi alors dans cet état.
En alternant méditations formelles et postméditations,
À la paix intérieure s’ajouteront joie et félicité,
Et tu goûteras à la saveur ultime de la vision pénétrante.
Maintiens la continuité de ta méditation, Péma Lingpa !
Envahi par la lassitude et le renoncement,
Moi, Péma Lingpa, moine du Bhoutan,
J’ai entonné ce petit chant de seize conseils
Qui a surgit dans mon esprit.
Puisse-t-il être utile aux êtres
Et ne pas mériter le blâme des érudits !
Péma Lingpa (1450-1521)
